Sunday, December 20, 2009
Ma chère Emma / My dear Emma
"Le 9 Février 1905,
Ma chère Emma,
J'ai écrit à L. il y a trois jours, mais je n'attendrai pas sa réponse ici, comme je pars après demain pour Rome. Mon adresse à Rome sera c/o [illisible]. Je laisserai direction que mes lettres me suivent. Je n'ai pas encore reçu aucune lettre de Caire (Caine ?). Votre ami, Jim (Jm ?)"
Ce voyageur qui visite Taormina durant l'hiver 1905 est préoccupé par les lettres qu'il écrit et celles qu'il ne reçoit pas. Comment garder le contact entre Paris, Rome et Taormina ? La carte postale envoyée à Emma dit l'angoisse des liens que l'on tisse, des liens qui se rompent. Elle dit peut-être aussi la peur d'une solitude, que la carte choisie pour cet échange vient mettre en image.
La promenade panoramique des jardins du Grand Hôtel San Domenico est bien déserte. Les neiges de l'Etna, en arrière-plan, les arbres sans fleurs disent la froidure de l'hiver. Assis sur un fauteuil, en retrait des bancs vides, un homme au visage indiscernable semble être un étranger en villégiature, tant le chapeau et un costume que l'on devine élégant le distinguent des paysans et des pêcheurs de Taormina. Les jambes nonchalamment croisées, il regarde le photographe et fournit l'échelle humaine du panorama qui s'ouvre derrière lui.
Ma chère Emma,
J'aimerai tant en savoir plus sur ce que cette carte montre, mais ne vous dit pas. Pourquoi ce séjour hivernal à Taormina de votre ami Jim (si je lis bien la signature...) ? Qu'est-il venu chercher ici, en cet hiver 1905, avant de se rendre à Rome ?
Ma chère Emma (aima ?),
Il me plait d'imaginer que votre ami aimait les garçons et que Taormina était l'un des rares lieux, en 1905, où cela pouvait se dire et se vivre. Résider pour quelques jours au S. Domenico était, pour ainsi dire, entrer dans la représentation, de l'autre côté du cadre, entrer dans les photographies de von Gloeden, respirer le même air et la même lumière que ses modèles à peine voilés. Ma chère Emma, peut-être votre ami a-t-il rencontré Giovanni ou Marco, Peppino, Pietro ou Nicola, qui ont prêté leur beauté aux bergers de Virgile et de Théocrite...
Si peu de précisions sur son séjour à Taormina, l'accent sur un proche départ, vers Rome, dernière étape avant Paris, mais le choix d'une image entre mille autre possibles (le Théâtre grec de Taormina eût été plus transparent) me font deviner tant de choses que votre ami ne pouvait vous dire...
Mais peut-être, ma chère Emma, est-ce juste mon imagination...
Votre ami, Jim (?), ne m'a laissé que ces quelques indices pour déchiffrer l'énigme de son séjour à Taormina.
Je ne sais par quel hasard, ma chère Emma, mais cette carte qui vous était destinée en 1905 vient de me parvenir en 2009.
Bien à vous, comme toujours,
Votre ami
Mr. Butterfly
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"On February 9, 1905,
My dear Emma,
I wrote to L. three days ago, but I am not expecting to receive his answer here, because I am leaving in two days to Rome. My address in Rome will be c/o [I cannot read]. I will leave instructions so my letters will be redirected to me. I did not receive any letter from Cairo (Caine ?). Your friend, Jim (JM ?)"
This traveller who visited Taormina during 1905 winter was very concerned by the letters he wrote, by the letters he did not receive yet. How to keep in touch, between Paris, Rome and Taormina ? The postcard he sent to Emma tells a concern about his personal web, about links he wanted to save, but that could be broken. Perhaps it also expresses a fear of loneliness, and the choice of this postcard to be sent to Emma just put an emphasis on this loneliness.
The panoramic promenade in the gardens of the San Domenico Grand Hotel seems to be quite deserted. The snowy slopes of Mount Etna, in the background, trees without flowers tell us that this is winter, at its coldest peak. While benches facing the sea are empty, we can see a man sitting on an armchair, a bit behind them. His face cannot be seen, but he looks like a foreign visitor: his hat and clothes that seem to be elegant make him so different from Taormina's peasants and fishermen. This gentleman, with his legs crossed, is looking at the photographer and provides the photograph with a human scale for the scenic view of the landscape behind him.
My dear Emma, if I may,
I would love so much to know more about what this postcard shows, but don't tell you. Why did your friend Jim (if I read correctly the signature of the postcard) spend a few days in Taormina ? What was he looking for here, in Febr. 1905, before going to Rome ?
My dear Emma (aima ? This pun cannot be translated: in French, "Emma" sounds like "aima", that is "loved").
I imagine that your friend whas loving young men and that Taormina, in 1905, was one of the few places where such a love could be said and lived. Spending a few days at the San Domenico Grand Hotel was, so to say, walking through the frame of representation, entering von Gloeden's photographs, breathing the same air and the same light as his barely veiled models. My dear Emma, perhaps your friend came to Taormina in order to meet Giovanni or Marco, Peppino, Pietro or Nicola, who gave their beauty to Theocritus or Vergil's shepherds....
In this postcard, there is no information about his actual stay in Taormina, but an emphasis about his forthcoming departure to Rome, last step, perhaps, before going back to Paris... So many other postcards could have been chosen, for example a view of Taormina Theater could have been far more neutral... Well, I feel and guess so many things your friend was unable to tell you...
Perhaps, my dear Emma, it is just my imagination...
Your friend, Jim (?), left me only a few clues to solve the enigma of his stay in Taormna, in february 1905.
I don't know, I don't know how or why, my dear Emma, but I just revceived, in 2009, the postcard he sent to you in 1905.
Yours, as always
Your friend
Mr. Butterfly
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