Saturday, November 28, 2009

Corso Umberto



"Taormina, le 12 avril 1903,

Cher André,

Enfin arrivé, long voyage, mais Taormina est un éblouissement. Tout est en fleurs, pas seulement les amandiers, l'Etna fume au loin, vue sublime depuis le teatro greco. Hotel San Domenico parfait, carrefour des élégances. Ai rencontré cet artiste allemand dont nous avons tant parlé. Il expose ses oeuvres Corso Umberto: rêves, idées, peintures ou photographies ? Un peu tout cela à la fois. Tu vois la façade de sa boutique sur ma carte, imagine la plus charmante des vitrines. Je songe à oublier Paris et à me transformer en pâtre grec, vivant d'olives, de soleil et d'amour, avec Marco mio et mes meilleures éditions de Virgile...
Tityre, tu patulae recubans sub tegmine fagi
siluestrem tenui musam meditaris aunea....*

Tibi, as always

Henri"

* "Tityre, couché sous l'abri d'un hêtre touffu, tu étudies un air champêtre sur tes minces pipeaux" Virgile, Bucolique, 1, v. 1.  (note de l'éditeur).

(Von Gloeden Archive, Lettre d'Henri à André, 1903 (référence: 1903/04/5).

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Taormina, April 12, 1903

Dear André,

Such a long journey, but at least, I am in Taormina: it is a dazzling sight ! Everything is blossoming, and not only almond trees. Smoke from Etna can be seen from a distance, the teatro greco offers a sublime view. San Domenico Hotel is perfect, so many elegant people meet there. I met this German artist we spoke so much about. There is an exhibition of his work Corso Umberto: dreams, ideas, paintings or photographs ? You can see the front of his shop on my postcard, feel free to imagine the most charming shop window. I am seriously thinking about leaving Paris forever and living as a Greek shepherd. I would survive with a few olives, with sun and with a lot of love, with Marco mio and my best editions of Vergil...
Tityre, tu patulae recubans sub tegmine fagi
siluestrem tenui musam meditaris auena...*

Tibi, comme toujours

Henri"

* Please, learn Latin or French language. The quote is from Vergil, Bucolics, I, 1 (note by the editor).

(Von Gloeden Archive, Lettre d'Henri à André, 1903 (call number: 1903/04/5).



Thursday, November 26, 2009

Nino mio...




Nino mio,

J'ai bien reçu ta carte de Taormina, en date du 12 juin 1898.

Il n'était pas besoin d'un long message. Ton nom suffit, Nino mio, ta belle signature tracée d'une plume aérienne, qui entoure ton nom comme des bras autour de l'aimé. Ton nom, écrit sur l'horizon de l'image, comme une nuage, entre ciel et mer, sur les pentes de l'Etna, ton nom qui donne tout son sens au panorama qui s'ouvre dans les ruines du théâtre où nous nous sommes si souvent promenés.

J'aime le point soigneusement tracé après ton nom: Nino, point. Tout le reste n'est que l'écume des jours, une brume sans conséquences ...

Nino mio, Nino bello, la belle photographie de Wilhelm que j'ai emportée avec moi me conserve le souvenir de ta beauté, la musique de ta voix, la poésie de ton accent chantant, la beauté de ton visage et l'horizon de ton regard, petit théâtre intime reflétant si bien le fondu enchaîné de nos états d'âme.

Grazie tanto, Nino mio ! Sei il mio amore, per sempre, tu lo sai....

Jacques

(Von Gloeden Archive,  Letter from Jacques to Nino, 1898 (call number: 1898/07/2).






"My dear Nino,

I have well received the postcard you sent me from Taormina, on June 12, 1898.

There was no need for a long message. Just your name is enough, my dear Nino, your beautiful signature, handwritten in such a ethereal way, is like a circle around your name, like arms embracing a loved one. Your name is written upon the horizon of this photograph, like a cloud, between sea and sky, across the slopes of Mount Etna. Your name offers a meaning, an orientation to the scenic panorama to be seen through the ruins of the Greek Theater, where we spent so many times together.

I love also the dot carefully drawn after your name: Nino, dot. Anything else if just the foam of daze, a mist without any consequence.

Nino mio, Nino bello, the splendid photograph Wilhelm gave me reminds me so much your beauty, the music of your voice, the poetry of your singing Sicilian accent, the beauty of your face and the horizon of your gaze, a small inner theater which is the mirror of our feeling, fading in, fading out..."

Grazie tanto, Nino mio ! Sei il mio amore, per sempre, tu lo sai...

Jacques"

(Von Gloeden Archive,  Letter from Jacques to Nino, 1898 (call number: 1898/07/2).

Shyness



"It is said that whenever a new model appeared uneasy at being photographed, the Baron would strip off his own clothes, don the leopard-skin, and together they would gambol about like young animal pups until the model lost his shyness."

Rictor Norton, The Beginnings of Beefcake Or, The Origins of the Male Nude in Photography

http://rictornorton.co.uk/beefcake.htm

Friday, November 20, 2009

Mandorli in fiori



Cette carte postale vintage éditée par G. Attanasio à Taormina, dans les années 1930-1935,  chante la beauté du printemps sicilien, la floraison des amandiers, véritable symphonie visuelle à laquelle la couleur donne toute son ampleur par rapport aux photographies en noir et blanc des années antérieures.

La jeune silhouette drapée dans une tunique blanche à l'antique rappelle que Taormina est aussi le pays des garçons en fleur. Jeune éphèbe se promenant dans les jardins de l'antique Tauromenium, entre une bibliothèque et un théâtre, une épaule, un bras et l'esquisse d'un buste font deviner un corps brun à peine dévoilé.

La splendeur du paysage et des arbres fleuris serait-elle le prétexte à une scénographie subtile du désir, où l'aimé est si proche, si lointain, dans l'image qu'il emplit de sa présence, où seul mon regard peut le rejoindre et marcher sur ses pas ?

Il me semble que cette carte postale a su saisir la quintessence de la mythologie arcadienne et érotique de Taormina au début du XXe.

W. von Gloeden est mort le 16 février 1931. Cette image montre combien sa vision a modelé en profondeur  la perception de Taormina.





This vintage postcard, published by G. Attanasio in Taormina, in the 30's, is  a visual song about the Sicilian spring, about the blossoming almond trees. It is a true visual symphony, enhanced by the use of colors that provides the landscape with its scenic dimension, more spectacular than in the black and white photographs of the early XXth century.

The silhouette of a young man, draped in a white tunic in the antique fashion, reminds us that Taormina is also the land of blossoming boys. This young ephebe seems to walk across the gardens of antique Tauromenium, between a a library and a theater: his shoulder, his right shoulder and arm and the beginnings of a torso invite the viewer to imagine a tanned body, partially unveiled.



The splendid lanscape and the visual firework of pink flowers could be interpreted as a pretext for a subtle way to express the essence of desire. The loved one is so close, so far away, he is inside a picture and only my gaze may join him and walk along the path he follows.

For me, this postcard offers a striking illustration of the arcadian and erotic mythology of Taormina, ine the early XXth century.

W. von Gloeden died on february 16, 1931. This postcard shows how his vision deeply determined the perception of Taormina.


Roland Barthes sur / on W. von Gloeden




"... von Gloeden prend le code de l'Antiquité, le surcharge, l'affiche pesamment (éphèbes, pâtres, lierres, palmes, oliviers, pampres, tuniques, colonnes, stèles), mais (première distorsion), de l'Antiquité il mélange les signes, combine la Grèce végétale, la statuaire romaine et le "nu antique" venu des Ecoles de beaux-arts: sans aucune ironie, semble-t-il, il prend la plus éculée des légendes pour de l'argent comptant. Mais ce n'est pas tout: l'Antiquité ainsi affichée (et par inférence l'amour des garçons ainsi postulé), il la peuple de corps africains. Peut-être est-ce lui qui a raison: le peintre Delacroix disait que le drapé antique ne se retrouvait bien que chez les Arabes. N'empêche que la contradiction est délectable entre tout cet attirail littéraire d'une Antiquité de version grecque et ces corps noirs de petits gigolos paysans (s'il en vit encore un, qu'il me pardonne, ce n'est pas une injure), au regard lourd, sombre jusqu'au bleu luisant des corselets d'insectes calcinés."

Roland Barthes, in: Wilhelm von Gloeden, Naples, Amelio Editore, 1978; texte repris dans: Roland Barthes, L'obvie et l'obtus, Essais critiques III, Paris, Editions du Seuil, 1982, p. 179.






"... von Gloeden begins with the laws of Antiquity, overloads them, parades them ponderously (with ephebes, shepherds, ivy, palms, olive trees, tunics, columns, steles) but (first distortion) from Antiquityy he mixes the signals, combining Greek flora, Roman statuary, and the "classical nude" of Beaux-Arts academies: with no irony, it appears, he accepts any worn-out legend as a genuine article. And that isn't all: Antiquity paraded thusly (with his love for boys cleary inferred) is then populated with dark bodies. Perhaps he's right: the painter Delacroix declared that antique draping looked good only on Arabs. It hardly matters — the result is a delicious contradiction of all the literary baggage from a Greek version of antiquity peopled with little peasant gigolos' dark bodies (if any are still living, I beg their pardon; it's not an insult) who wear heavy expressions as dark as the luminous blue from corselets of burned insects".

Roland Barthes, in: Taormina: Wilhelm Von Gloeden, Altadena CA, Twelvetrees Press, 1990 (translation by Angus Whyte).

Thursday, November 19, 2009

Lettres de Taormina / Letters from Taormina




Pourquoi suis-je si fasciné par ces cartes postales du début du XXe siècle, où l'écriture manuscrite d'inconnus entoure gravures et photographies de Taormina ? 1903, 1904, 1905... Allemands (nombreux), français, autant de traces d'un moment de vie, de l'étape d'un voyage, de la pensée pour un autre, d'une vision partagée. Ce que racontent ces cartes, c'est la lumière de la Sicile, les panoramas de Taormina, les fumées de l'Etna lointain, peut-être aussi un Eldorado trouvé dans une quête des origines et de la beauté. Taormina, son théâtre grec, ses hôtels de luxe, et l'étrange imagerie homoérotique produite par un baron allemand excentrique qui libère les rêves arcadiens et les désirs enfouis de tant de visiteurs étrangers.



Ces cartes postales sont des histoires de vies, et j'aime imaginer que parmi ces touristes du début du siècle se trouvaient des esthètes sensibles à la beauté des bergers et des jeunes satyres, des éphèbes et des dieux enamourés que l'on rencontrait sur les photographies de von Gloeden.

Si les techniques d'impression et de gravure font de ces cartes postales des objets en série,  des reproductions mécaniques dans une industrie de l'image, comme l'a si bien analysé Walter Benjamin, l'écriture manuscrite qui emplit les blancs et encadre la photographie rend chaque objet unique, témoin irremplaçable d'une histoire qu'il nous faut imaginer...




Why am I so fascinated by these vintage postcards from the early XXth century, where unknown writers wrote around engravings and views of Taormina ? 1903, 1904, 1905 ... Many German, French too... these writers left a trace of a step in their life, of a step in a journey, of a thought for a loved one, of a vision they wanted to share. These postcards tell the story of the Sicilian light, of Taormina scenic landscapes, of the remote smokes of Mount Etna, perhaps also the discovery of a new Eldorado found during a quest of origins and beauty. Taormina, its Greek theater, its luxurious hotels and the weird homoerotic imagery produced by a eccentric German Baron, opening a free space for the Arcadian dreams and secrete desires of so many foreign visitors...

These vintage postcards tell the stories of unknown, but real lives, and I love to imagine that, among these tourists travelling to Taormina at the beginning of XXth c., there were esthetes not totally unsensitive to the beauty of sheperds and young satyrs, of ephebs and loving gods one could meet on von Gloeden's photographs.

Through printing and engraving technics, these postcards result from a mass production, they are mechanical reproductions created through industrial processes, according to Walter Benjamin's characterization. At the same time, however, handwriting makes each of these postcards a unique artefact, filling up blank spaces, framing the picture with words and letters. These postcards are unique testimonies of unknown lives we have to imagine...

Regard / Gaze



La plaque photographique a fixé à tout jamais ce regard profond, inquiet ou sidéré, interrogeant au-delà du photographe une technique qui fige pour toujours un buste et un visage. Moment de vertige métaphysique face au double et au miroir, devant le temps qui s'arrête l'instant d'une pose, qui impressionne autant le modèle que le négatif où se grave son ombre.

The photographic plate saved forever this deep gaze, uneasy or dumbfounded, questioning beyond the photographer a technology able to fix a face and a torso. This is a moment of metaphysical vertigo for a boy  in front of his double and of a mirror, in front of a frozen time, as long as a pose lasts, a pose that acts on the model as well as on the negative plate where his shade is engraved.

Thursday, November 12, 2009

A la recherche du temps perdu



On May 1st of 1905, a German tourist sent to a close one this postcard displaying a scenic view of the Taormina's area landscape. I am deeply moved by this postcard. I love the way the photograph and the writing interact: the handwriting is like a frame of the vintage photograph. It fills up the sky and the lower margin of the photograph. The photograph and the written text are two distinct discourses that interact on the same medium.

I love too the way this photograph provides the viewer with the feeling of a wide and open space, with a panoramic gaze that is shared with a kid at the forefront. He or she is holding what seems to be a clay pot. Perhaps there is a spring of fresh water nearby ?




This photograph, at the edge of the XXth century, catches an intemporal world. We could be in the fourth century B.-C. or under the Roman rule, nothing denotes the modernity, except the medium itself, a photograph printed on a postcard, and the language, German, and, indeed, the date.

This view inspires me a special feeling of solitude, happiness and fullfilment. I always enjoyed scenic panoramas without any intruders to disturb my meditative contemplation. Here, the viewer is not alone. There was a photographer behind him, and now there are you and me too, and so many others...

The photographer fixed this amazing view on his negative plate, this unique moment was saved and shared through the printing of postcards.


In 1905, Wilhelm von Gloeden was an active photographer in Taormina. His European reputation as a provider of homoerotic imagery was already built up, and Taormina was a hot spot to visit, for its antique theater, for its scenic and panoramic landscapes, for its unique view on the Etna smoking mountain, but also for a unique revival of the world of ancient sheperds, gods and ephebs who haunted the Greek bucolic landscape.

I love to imagine that the German tourist who sent this postcard met the Taormina German Baron, and that he was not insensitive to the charm of the cute young men displayed in von Gloeden's photographs...




This vintage postcard is a new acquisition of my small collection of memorabilia linked with Taormina and the Arcadian dreams that provided this small Sicilian city with such an iconic status at the beginning of the XXth century....

Sunday, November 8, 2009

Quand le corpus est hors de portée / When the corpus is out of reach



Le modèle sur la droite, avec un bandeau dans les cheveux, est l'un des candidats les plus consensuels pour être Il Moro. Etes-vous d'accord ?

Cette photographie assez rare me conduit à cette question: est-il possible aujourd'hui d'avoir une idée de l'oeuvre du baron von Gloeden, d'en faire l'inventaire, d'en constituer le corpus ?

La version française de Wikipedia, sv. Wilhelm von Gloeden, évalue à 7000 photos l'étendue probable de l'oeuvre du baron. Ce serait le corpus que von Gloeden laisse à Pancrazio Bucini, à sa mort, en 1931. Les fascistes, en 1933 et en 1936, détruisent une grande partie des plaques originales. Bucini n'aurait pu conserver que 800 plaques négatives, environ. A sa mort, en 1963, il les laisse à son fils, qui les vendra à un antiquaire sicilien. Ce dernier les vend à la Fondation Alinari, à Florence.

Si un grand nombre de plaques négatives ont été détruites, les tirages albuminés ou argentiques vendus par von Gloeden de son vivant se trouvent sans doute encore dans des collections privées, en Europe, en Amérique, en Asie. Peut-être donnés à des Musées, ils se retrouvent aussi dans des ventes aux enchères ou dans des galeries spécialisées dans les photographies vintage.




L'oeuvre de von Gloeden se diffuse ainsi selon une logique centrifuge et imprévisible: combien de collectionneurs, aujourd'hui, ont des photographies de von Gloeden qui ne sont pas répertoriées, qui sont inédites ?

Pourra-t-on jamais reconstituer la continuité de la numérotation que von Gloeden apposait sur le revers de ses photographies, au crayon bleu ?

Il est impossible de reconstituer aujourd'hui le corpus de cette oeuvre... Des photographies inédites peuvent surgir tous les jours dans des ventes aux enchères ou dans des galeries d'art, avant de disparaître à nouveau pour des années, dans des collections privées...



This model, with a headband among his hairs, seems to be one of the most consensual (or just sensual ?) models for being Il Moro. Do you agree ?

This rare photograph (at least for me) inspires me to ask a question: is it possible, today, to have a clear idea of the extant of von Gloeden's work, to make its inventory, to build up its corpus ?

According to Wikipedia (French version), von Gloeden's work would be around 7000 photographs. Such would be the corpus that Gloeden left to Pancrazio Bucini in 1931, when he passed away. Italian fascists in 1933 and 1936 destroyed many negative plates of these photographs. Bucini got back around 800 negative plates. The loss was huge. In 1963, after the death of Bucini, his son sold the plates to a Sicilian antiquarian shop. The Alinari Foundation in Firenze bought the all of them.




Many original negative plates were destroyed. But albuminate and silver prints sold by von Gloeden during his life are probably safe today in private collections, in Europe, in America or in Asia. Perhaps some of them were given to art museums, others were offered for sale in auctions or in specialized art galleries.

Von Gloeden's work diffusion is ruled by a centrifugal logic: from Taormina to any place in the world. How many collectors today possess von Gloeden's photographs prints that are unpublished and unknown ?

Will it be ever possible to reconstitute the whole series, according to the serial numbers that von Gloeden wrote with his blue pencil on the reverse side of his photograph prints ?



I am afraid it is impossible today to have an idea of the actual corpus of von Gloden's photographic work. Unknown photographic prints may appear any time in auctions or art galleries, and then disappear for years in private collections...

Noms oubliés / Forgotten names



Une part du charme mélancolique de ces photos de von Gloeden réside dans le mystère et l'anonymat qui entourent aujourd'hui les jeunes gens de Taormina.

Et pourtant, nous connaissons certains de leurs noms. Ils s'appelaient Vincenzo Lupicino, Peppino Caifasso, Pietro Caspani, Nicola Scilio, sans parler des jeunes filles, comme Maria, la nièce du curé de Castelmola (source: Pietro Nicolosi, L'Arte di Gloeden. Il Barone Fotografo, Edizione Giovanni Malambri, 1979). Il y avait aussi Pancrazio Bucini, Il Moro, modèle, ami et héritier du Baron...

Mais comment mettre des noms aujourd'hui sur les visages et les silhouettes qui peuplent les paysages arcadiens de von Gloeden ?  Au fil des livres et des pages web qui reproduisent aujourd'hui l'oeuvre de von Gloeden, plusieurs candidats possibles sont proposés pour le nom d'Il Moro, dont on sait qu'il fut ainsi surnommé parce qu'il ressemblait à un garçon d'Afrique du nord.

Un siècle plus tard, les modèles de von Gloeden sont devenus anonymes. Ils sont devenus des icones, les acteurs d'un monde fictif, d'un jeu de rôles, d'un théâtre du désir, d'une fantaisie d'esthète fortuné.

La poésie et la mélancolie de ces photos résident, à mes yeux, dans la présence de ces garçons de Taormina aux noms oubliés, dans ces visages et ces regards qui nous parlent aujourd'hui sans que nous puissions leur répondre.



For me, a part of the melancholic charm of von Gloeden's photographs lies in the mystery and in the anonymity that surround today these young men from Taormina.

Actually, we know the names of a few of them: Vincenzo Lupicino, Peppino Caifasso, Pietro Caspani, Nicola Scilio, we know also the name of Maria, the niece of the priest of Castelmola (reference: Pietro Nicolosi, L'Arte di Gloeden. Il Barone Fotografo, Edizione Giovanni Malambri, 1979). There was also Pancrazio Bucini, whose nickname was  Il Moro, von Gloeden's model, friend and heir.



How could we give names, today, to the faces and the figures we can see in von Gloeden's Arcadian landscapes ? Browsing contemporary books and web pages devoted to the Baron's photographic world, one can even find several possible models who could be Il Moro, this lad who got this nickname because he looked like a boy from North Africa...



These photographs are one century and a few years old... Von Gloeden's models are now anonymous. They became icons, actors in an imaginary world, actors in a roles game, in a theater of desire, in the fantasy of a wealthy aesthete.




The poetry and melancholy of von Gloeden's photographs, for me, are linked with these Taormina boys whose names are forgotten, with these faces and these eyes that tell us so many things today, while we are unable to answer them...