Il faudrait établir un recensement de l'humanité gloedenienne... Remettre les noms sur les visages: Marco, Giovanni, Pietro, Domenico, Antonio, Francesco, Giuseppe et tant d'autres... Il faudrait faire la prosopographie de ce petit monde, avec la minutie des épigraphistes qui reconstruisent les sociétés d'Athènes ou de Rome...
Il faudrait suivre, de photo en photo, la vie de tous ces garçons qui impressionnèrent la camera obscura de von Gloeden...
J'aimerais attacher un nom à chacun d'eux, reconstituer le cours de sa vie, son destin...
Saisis aux seuils de l'adolescence, étonnés, flattés peut-être, complaisants aussi devant l'intérêt de cet allemand excentrique qui les considérait comme les princes de son royaume... et métamorphosés, le temps de la pose devant l'objectif en jeunes dieux hors du temps, en pure beauté, avant de se glisser, à nouveau, dans les vies de petits artisans, pêcheurs, paysans, bergers ou mécaniciens qui étaient les leurs...
Le bandeau blanc évoque les couronnes immémoriales des éphèbes et jeunes athlètes que l'on imagine dans les rues, sur l'agora, dans les palestres d'Athènes. La fleur tenue en main répond à la beauté du visage, à la sereine vérité de son expression. Entre deux niveaux de gris, une frontière imperceptible vient délimiter la mer et le ciel, elle ouvre l'horizon de cette photo.
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