Tuesday, January 19, 2010

Essebac sur les photographies de von Gloeden et von Plüschow (1)



(Von Gloeden, Portrait, ma collection)

"La via Sistina, la rue des marchands de photographies dont la consommation est grande, ici, comme le besoin d'emporter avec soi le souvenir matérialisé de tout ce qui enchante les yeux. A côté des reproductions de monuments quelconques et d'oeuvres d'art  qui déjà, celles-ci, sont pleines d'intérêt, il y a des photographies charmantes; ce sont des études de modèles prises sur nature, un peu partout, particulièrement à Rome, à Naples et à Taormine. Les gars de Taormine sont superbes, mais leur nudité a l'aspect un peu rude; leurs yeux très beaux éclairent des visages réguliers, mais fermés, ne laissant deviner aucun frisson de leur être intérieur; à part quelques jeunes garçons délicats et d'une joliesse plutôt efféminée, les autres ont des allures solides d'étalons et feront, certes, de beaux enfants comme eux; j'allais dire de fort jolies bêtes, car il m'a paru que c'est l'animalité jolie qui domine surtout en eux malgré la forme pure des visages où ne s'égare aucune pensée. Mais ceux de Naples et de Rome ! Quelle exquise finesse dans les yeux, dans la bouche dont la lèvre inférieure fuyante vers le menton termine un profil impeccable; quelle intense harmonie de formes et de lignes ! c'est l'énergique et presque musicale beauté des chairs lumineuses et veloutée."

Achille Essebac, Partenza... vers la beauté !, 3e éd., 1903, p. 194-195.


Je ne peux partager entièrement le jugement d'Achille Essebac... Il me semble en effet que les "gars de Taormine" nous montrent parfois leur âme et que leurs visages et leurs regards ont une beauté quasi métaphysique, ouvrant sur des abîmes intérieurs, des questions et des pensées qui, au-delà des plaques photographiques de von Gloeden, continuent à impressionner celui qui les regarde aujourd'hui.

Ce magnifique portrait que j'ai acquis récemment me fait rêver par la multitude des pensées et des états d'âme qui habitent ce regard...

2 comments:

Anonymous said...

Les garçons de Taormina apprécieront votre défense de leur beauté, mais lorsque l’on compare ce portrait, dont vous êtes l’heureux possesseur, avec le précédent, tout en finesse, on ne peut que se ranger à l’opinion – si fine, si pénétrante –, d’Achille Essebac.

Merci pour la richesse de votre blogue, que j’apprécie beaucoup, et pour votre extraordinaire documentation.

Butterfly said...

Merci beaucoup pour votre commentaire amical et encourageant. Cela me fait plaisir qu'un lecteur de ce blogue manifeste ainsi son intérêt...

Comme vous, je trouve qu'Achille Essebac est un magnifique écrivain, d'une grande finesse et d'un lyrisme certain sur certains sujets...

Vous connaissez sans doute le beau livre de Jean-Claude Féray, Achille Essebac romancier du désir, Paris, Quinte-feuilles, 2008, qui exhume Essebac de l'oubli injuste dans lequel il est tombé. Son récit de voyage en Italie, Partenza... vers la beauté !, peut être téléchargé sous forme d'un fichier .pdf sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France.

Quant à la beauté des uns et des autres, à chacun son regard, effectivement... :-)