Friday, March 12, 2010

Le Dionysos des confins / Dionysus in Taormina's outskirts


"Cher Wolfgang,

Je vous remercie de votre belle lettre et je suis heureux de savoir que vous êtes bien rentré à Göttingen.
Je suis heureux aussi de savoir que mes photographies vous font rêver et que le soleil de Taormina illumine vos souvenirs...

Vous me dites aimer particulièrement les trois photographies de Peppino, je vous comprends... Je vais vous raconter leur histoire.

J'avais relu les Métamorphoses d'Ovide, les Idylles de Théocrite et les Bacchantes d'Euripide, et il m'est venu l'idée de photographier Peppino loin du village, dans les montagnes de Taormina où ne s'aventurent que les bergers et les brigands. Loin des terres cultivées et des habitations, ces confins sauvages étaient pour les Grecs un territoire où l'on pouvait rencontrer, au détour d'un chemin, un dieu ou une déesse sous l'apparence trompeuse d'un voyageur de grand chemin. L'étranger pouvait surgir à l'improviste, sans que vous l'ayez vu de loin ni entendu approcher...

Malheur au berger imprudent qui manquait de respect à l'étranger !  Il pouvait s'agir d'Hermès, le messager des dieux, ou de Pan, qui s'amuse à inspirer la panique au berger et à ses troupeaux comme aux armées avant la bataille ! Il pouvait s'agir aussi de Dionysos, divinement beau, un jeune étranger qui troublait les femmes des cités et leur faisait courir la campagne aux rythmes de sa musique...

Lorsque Peppino m'a conduit à cette grotte connue de lui seul, je l'ai imaginé en Dionysos, entouré de lierre et de feuillages aux parfums enivrants. Il s'est appuyé au rocher, laissant l'ombre et la lumière sculpter son corps, et avec un imperceptible sourire, a laissé son regard partir au loin...

Imaginez, cher Wolfgang, imaginez qu'au détour d'un chemin, vous rencontriez Dionysos...

Votre ami

Wilhelm von Gloeden"

Von Gloeden Archive, Lettre de W. von Gloeden à Wolfgang von D., call number 1895/06/12/01.

"Dear Wolfgang,

Thanks so much for your beautiful letter: I am happy to know that you are back to Göttingen, I am happy too that my photographs bring you so many pleasant dreams and that Taormina's sun shines for ever in your memory...

You write that you enjoy particularly the three photographs of Peppino, and I share your fascination ! I will tell you the story behind these photographs...

I had just finished reading again Ovid's Metamorphoses, Theocritus Idylls and Euripides Bacchae, and I decided to make a photographic session with Peppino in a remote place, far away from the village, in Taormina's mountains where only shepherds and brigands can be met. Far away from cultivated fields and from any inhabited area, these outskirts, in the wilderness, were for the ancient Greeks a strange land where one could meet a god or a goddess looking like a vagabond. The stranger could appear unexpectedly, without being seen from far away or heard while walking...

Unfortunate was the uncautious shepherds who was not bowing to the stranger in the most respectful manner ! This stranger was perhaps Hermes, the messenger of the gods, or Pan, who had fun while inspiring panic to shepherds or soldiers before a battle ! He could be too Dionysius, beautiful as only gods are, a young stranger who made the women of the city going mad and forced them to run in the wilderness, at the rythm of his music...



Peppino lead me to a cave he is the only one to know. I imagined him as a Sicilian Dionysus, surrounded with ivy and leaves giving off an intoxicating perfume. He leant against the rock, light and shade were sculpting his body. With an imperceptible smile, he looked at the horizon...

Imagine, dear Wolfgang, imagine that along a path in Taormina's wilderness, you encounter Dionysus...

Your friend

Wilhelm von Gloeden"

Von Gloeden Archive, Letter from W. von Gloeden to Wolfgang von D., call number 1895/06/12/01.

1 comment:

Tiago said...

Verily impressive.